
Une ombre s'approche
de ma dépouille blafarde
Pour déposer sur mon cou nu un baiser langoureux
Puis vient me sussurer à l'oreille que je tarde
A enfin participer à ce doux jeu d'amoureux.
Certains
affirment avoir courageusement dit Non!
Avoir refusé l'éventualité d'un marché
Avoir su en tout cas garder l'oeil sage de l'archer
Ceux-là sont morts et enterrés, ça, nous le devinons...
Pour
ma part j'ai cédé à cet ignoble chantâge
Pour la perte de ce qu'Ils appellent mon humanité
Acquis l'éternelle beauté -perdu ma vanité-,
Ce que n'offraient pas les miens, une vie de partage:
Je
les nomme "Frères" car comme moi ils survivent
Dans ce monde humain d'impitoyable cruauté,
A t-on déjà ouï dire d'un de nous faire sauter
Une ville, d'éliminer tout âme qui vive ?
D'âme
certes nous n'en avons point trouvé l'usage
La bonne morale ne nous intéresse guère
Nous n'avons compris pourquoi déclencher une guerre
Pour inculquer ses idées, imposer ses usages
Ceux
qui nous rejoignent le font de bonne volonté
Certains de leur choix de ne plus jamais vivre aveuglés
Surs de quitter Le Troupeau, ne plus avoir à beugler,
Ne plus jamais se cacher sous ce sourire éhonté
Je
les nomme "Frères" car comme moi se nourissent
Du breuvage le plus doux, agréablement salé
De ce rouge qui colore vos joues, vous laisse aller
Ce qui vous rend faible, ces gouttes qui vous pourrissent...
La
faucheuse, certes, est parfois indispensable
Un indice ? Quand Vous vous imaginez trop parfaits
Quand votre pseudo-raison vous devient dispensable
Quand nous rejoindre vous semble un idéal surfait
Mais
très rares sont ceux que le sang répugne à tel point
Qu'ils préfèrent rester eternelement aveuglés
Par la main froide de la Mort doucements étranglés
Dans un dernier spasme de regret, en serrant les poings
Je
les nomme "Frères" car comme moi ils sont très
beaux
Et bien débarassés de leurs faiblesses Humaines.
Frères d'âme, planant dans les ombres tels des corbeaux
Frères de sang, patients jusqu'à la prochaine mène...
Arallu
Illustration by Ambrelune |